Dialogue sur l’avenir des déchets radioactifs
Pour comprendre ce que signifie exactement ‘radioactif’, il faut aller au cœur de la matière : l'atome. Tout ce qui est tangible se compose d’atomes : la nature, le corps humain, tout ce qui nous entoure. Chaque atome est constitué d'un noyau central composé de protons et de neutrons et entouré d'un nuage d'électrons. L'atome est souvent représenté comme un minuscule système solaire avec le soleil (noyau atomique) au centre et les planètes (les électrons) qui gravitent autour de lui
La plupart des atomes sont stables et leur noyau ne change pas. Mais certains atomes ont un noyau instable. Ils cherchent en quelque sorte à prendre une autre forme dans laquelle ils se sentent plus stables.
Au cours de cette métamorphose, ces atomes libèrent de l’énergie sous forme de particules ou d’ondes électromagnétiques. Cette énergie particulière est appelée ‘rayonnements ionisants’. La radioactivité est le terme pour désigner cette transformation avec émission de rayonnements ionisants.
Une substance radioactive émet de l'énergie jusqu'à ce que le noyau ait atteint un équilibre. Cela peut se faire en plusieurs étapes. Parfois, il faut même toute une chaîne de désintégration avant que cet équilibre ne soit trouvé. La désintégration des matières radioactives suit des lois naturelles que nous ne pouvons pas changer. Cette désintégration est parfois très rapide, parfois très lente. En d'autres termes, chaque matière radioactive a sa propre ‘vitesse de désintégration’. Elle est généralement exprimée par la ‘demi-vie’. Il s'agit du temps pendant lequel la moitié de la substance radioactive a été convertie en une autre matière. Certaines matières radioactives ont une demi-vie de seulement quelques secondes et d'autres de milliers et de milliers d'années.
Le rayonnement est un terme général pour désigner une émission d’énergie sous la forme de particules en mouvement ou d’ondes. Il existe différents types de rayonnement : rayonnement lumineux, thermique, ultraviolet, cosmique, rayons X ...
On distingue deux grandes catégories de rayonnement : le rayonnement ionisant et non ionisant. Cette subdivision fait référence à la teneur en énergie et à la dangerosité du rayonnement. De nombreuses formes de rayonnement, comme la lumière visible, la chaleur, les micro-ondes ou les ondes radio, n'ont pas une énergie suffisante pour dégrader des atomes et sont donc appelées rayonnements non ionisants.
Un rayonnement ionisant est riche et énergie et peut modifier des atomes. Le rayonnement radioactif appartient à la catégorie des rayonnements ionisants, tout comme les rayons X utilisés pour réaliser des radiographies à l’hôpital, et le rayonnement cosmique.
Les rayonnements qui résultent de la dégradation d’un noyau d’atome sont classés en trois catégories : rayons α- (alpha), β- (bêta) et γ- (gamma) :
À côté de cela, d'autres rayons peuvent aussi être émis lors de la dégradation de l’atome, dont les rayons X, les neutrons, les rayons cosmiques, les muons, les positrons, etc. Cependant, cela nous mènerait trop loin d’aborder en détail dans cette note tous les types de rayonnements émis par les noyaux atomiques instables.
Notre corps est quotidiennement bombardé par des rayonnements ionisants, provenant en partie de l'espace (par exemple le rayonnement cosmique) et en partie de noyaux atomiques instables présents dans l'environnement qui se désintègrent spontanément en émettant un rayonnement ionisant.
Ces matières radioactives naturelles sont présentes partout : dans le sol, dans l'air, dans notre alimentation et même dans notre propre corps. Un gaz radioactif spécifique, le radon, peut par exemple pénétrer dans les bâtiments à partir du sol. Les matériaux de construction peuvent aussi contenir des substances qui entraînent une exposition accrue aux rayonnements. Des traces de plomb et de polonium radioactifs sont présentes dans les poissons et les fruits de mer. Et même les bananes sont radioactives dans une certaine mesure.
Bien que de telles sources de rayonnement soient naturellement présentes tout autour de nous, nous pouvons faire des choix qui réduisent le degré d'exposition : en choisissant comment et où nous vivons (l'exposition au radon est par exemple plus élevée dans le sud de la Belgique que dans le nord), ce que nous mangeons et ce que nous buvons.
Il existe également des rayonnements radioactifs artificiels, qui résultent d’activités humaines. Nous utilisons la radioactivité à des fins médicales (radiologie, radiothérapie, médecine nucléaire,…), mais le fonctionnement des réacteurs nucléaires pour produire de l'énergie électrique est lui aussi basé sur la radioactivité, tout comme l'irradiation de certaines denrées alimentaires pour éviter leur contamination par des micro-organismes.
Il existe deux modes d’exposition aux matières radioactives : par irradiation et par contamination. Il y a irradiation lorsqu’on se trouve à proximité d’une source radioactive qui nous irradie. Il ne faut pas nécessairement un contact physique direct entre le corps et la matière radioactive. C’est par exemple le cas lorsqu’une tumeur est irradiée : le corps du patient est exposé à un rayonnement émanant d’une source. L’irradiation s’arrête lorsque la personne s’éloigne suffisamment de la source.
Si nous entrons en contact avec une matière radioactive, nous risquons une contamination. En cas de contamination externe, les particules radioactives adhèrent à la peau. La contamination interne se produit lorsque nous inhalons, mangeons ou buvons des particules radioactives. Les particules ingérées vont émettre des rayonnements ionisants dans notre corps et peuvent endommager les tissus environnants. On parle dans ce cas de radiotoxicité.
Tout le monde est exposé à la radioactivité naturelle. Les rayonnements ionisants peuvent endommager les cellules de notre corps, en particulier le matériel héréditaire, l'ADN. En général, nos cellules peuvent réparer ces blessures. Mais lorsque l'exposition est très intense ou est concentrée dans le temps, les mécanismes de réparation réussissent moins bien à réparer les dégâts.
Sur son site internet, l’AFNC distingue trois paramètres qui déterminent l’ampleur et la nature des effets de l’exposition de notre corps à des rayonnements ionisants :
L'exposition à une forte dose de rayonnement peut avoir des effets immédiats sur notre corps : par exemple des brûlures, un syndrome d’irradiation avec des nausées, des diarrhées, un manque croissant de cellules sanguines (entraînant des saignements) et un risque accru d'infections. Dans les cas graves, la mort peut survenir en quelques jours.
À plus faibles doses, on craint surtout l'apparition d'effets retardés tels que le cancer et des maladies héréditaires. Un lien clair a été observé entre le niveau de la dose de rayonnement et l'augmentation du nombre de cas de cancer. Les rayonnements radioactifs modifient le matériel génétique (ADN) de la cellule, ce qui lui permet de se diviser de manière incontrôlée et de donner naissance à une tumeur.
En plus du cancer, les rayonnements radioactifs favorisent également des maladies héréditaires. L’embryon et le fœtus peuvent souffrir de troubles du développement lorsqu'ils sont irradiés ou contaminés dans l'utérus de la mère.
Certains atomes radioactifs (comme le césium par exemple) se diffusent de manière homogène dans l’ensemble de l’organisme tandis que d’autres se concentrent dans un ou plusieurs organes (c’est le cas de l’iode, qui se fixe sur la glande thyroïde). En outre, la nature des rayons est également importante. Par exemple, l’absorption d’une dose de rayonnement alpha fait beaucoup plus de dégâts dans notre corps que la même dose de rayonnement bêta ou gamma.
À doses égales, les risques sont très différents selon le profil de la personne. Les fœtus, les enfants et les femmes enceintes sont les plus sensibles aux effets des rayonnements ionisants. Tous les organes n’ont pas non plus la même radiosensibilité : l'impact des rayonnements ionisants sur les ovaires et les testicules est par exemple 200 fois plus important que sur la peau et les tissus osseux.
La radioactivité échappe à tous nos sens : on ne peut ni sentir, voir, goûter, humer ou entendre les rayons radioactifs. Pourtant, il existe des instruments de mesure extrêmement précis qui nous permettent de mesurer même les plus faibles quantités de rayonnement radioactif.
L'une des unités utilisées pour mesurer la dose de rayonnement absorbée est le Gray (Gy), qui représente la quantité d'énergie cédée à la matière par les rayonnements ionisants. Pour ceux que cela intéresse, un gray correspond à l'absorption d'un joule d'énergie (J) par kilogramme (kg) de matière ou de tissu.
La nocivité biologique pour l'homme due à l’absorption (par ingestion ou par inhalation) d'une substance radioactive est souvent exprimée en sievert. Cette mesure prend en compte l'impact de la nature du rayonnement sur les différents tissus d’un corps humain adulte.
L’Agence fédérale de Contrôle nucléaire (AFCN) a estimé en 2015 l’exposition moyenne aux rayonnements ionisants en Belgique à environ 4 milliSievert/an. Cette moyenne comprend aussi bien la radioactivité naturelle qu’artificielle.
Environ 60% (soit 2,4 mSv) de l’exposition annuelle moyenne aux rayonnements ionisants d’un habitant belge est imputable au rayonnement naturel.
Les 40% restants sont dus à des applications médicales, comme la radiologie et la médecine nucléaire.
La dose de rayonnement reçue lors d'une radiographie du bas-ventre (environ 0,5 mSv) équivaut à une dose de trois mois de rayonnement naturel. Un scanner de l'abdomen (10,5 mSv) est l’équivalent de quatre ans ou 48 mois de rayonnement naturel.
Les installations nucléaires industrielles (dont les centrales nucléaires) sont responsables de moins de 1% de la dose annuelle de rayonnement qu’un Belge reçoit en moyenne.
Il va de soi que l'exposition individuelle aux rayonnements ionisants est très variable dans la population. La dose réelle par individu dépend du lieu de résidence, de l'exposition individuelle à la médecine et à la radiologie, de la radiothérapie pour traiter le cancer, d’une exposition éventuelle en raison d’activités professionnelles, du nombre d'heures de vol au cours de l'année et de nombreux autres facteurs.
Selon le programme des Nations unies pour l'environnement, on s’intéresse davantage qu’auparavant aux effets de l'exposition aux rayonnements sur les animaux, les plantes et les micro-organismes. L'opinion qui prévalait au cours des dernières décennies était que si les êtres humains étaient correctement protégés, ce serait probablement le cas aussi pour les animaux et les plantes.
Une recherche des Nations unies sur les effets de l'exposition aux rayonnements sur la biosphère a cependant clairement montré que les animaux et les plantes réagissent différemment à l'exposition aux rayonnements : de tous les animaux, les mammifères sont les plus sensibles aux rayonnements, les grands animaux l’étant encore plus que les petits.
Il en va de même pour les grandes plantes par rapport aux petites, alors que certains insectes, bactéries et virus résistent à de très fortes doses de rayonnements ionisants.
Les principaux effets sur les populations animales et végétales ont probablement trait à la fertilité, à la mortalité et à la production de mutations. Les changements dans la reproduction, par exemple le nombre de jeunes, sont un indicateur très fiable des effets des rayonnements, davantage que la mortalité.
Toute personne susceptible d'entrer en contact avec des substances radioactives doit se protéger efficacement de l’irradiation et de la contamination. Quelques principes généraux s'appliquent :
Dossier AFCN. Qu’est-ce que la radioactivité?
AFCN. Effets des rayonnements ionisants.
AFCN. Exposition des bébés et enfants.
AFCN. Evitez les rayons pendant la grossesse.
AFCN. Exposition annuelle aux rayonnements ionisants en Belgique.
AFCN. Comparaison des doses de rayonnements.
UN Scientific Comittee on the Effects of Atomic Radiation (UNSCEAR). Dossier: Radiation, effects et sources – FR version.
Rijksinstituut voor Volksgezondheid en Milieu (RIVM). Straling en radioactiviteit uitgelegd.